Grégoire LEMAIRE céramiste : INTERVIEW #19

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Découvrez l’univers unique de Grégoire Lemaire, céramiste passionné depuis plus de 12 ans, reconnu pour ses grandes pièces sculpturales et son utilisation innovante des techniques de basse température. Dans cette interview captivante, il partage avec nous ses débuts, ses inspirations et les secrets de fabrication qui rendent ses œuvres si uniques.

Gregoire lemaire ceramiste

Grégoire LEMAIRE INTERVIEW sur YOUTUBE

Anne : Bonjour Grégoire, merci infiniment d’avoir accepté cette interview. Surtout que, voilà, tu délaisses un petit peu ton stand pour cette interview. Parce que là, on est à la 11e fête céramique de la Genevraye et il y a une trentaine d’exposants à peu près. Et donc, dont toi c’est ça ?

Poterie de la Genevraye

Grégoire : Bonjour. Merci à toi.


Et ça fait combien de temps que tu es céramiste ?

Grégoire :
Alors ? Ça va faire 12 ans que je fais de la céramique, mais j’ai fait longtemps en amateur.
Et c’est ici que j’ai commencé ma vie de céramiste. J’ai fait ma première expo ici même, donc c’est pour ça que je suis attaché à la fête.

Anne :
C’est tous les ans ?


Voilà, j’y suis tous les ans, dans la mesure du possible, ouais.

Grégoire :
Voilà, donc il y a 6 ans, j’ai fait mon premier marché ici.

Anne :
Voilà, et tu fais régulièrement des marchés, des expositions ?

Grégoire :
Alors depuis quelques années, oui, j’en fais de plus en plus. J’ai tendance maintenant à essayer de limiter un peu parce qu’il faut avoir le temps de faire les pièces. Le marché, c’est un temps très différent donc il faut savoir organiser son temps pour faire tout.

Anne :
Tu étais à Saint-Sulpice cette année ?

Grégoire :
Alors pas cette année. Je l’ai fait 2 fois, il y a 2 ans.

Anne :
C’est une bonne expérience pour toi ?

Grégoire :
C’est une expérience géniale. Saint-Sulpice, c’est un peu le rêve. Surtout que moi, ça m’est arrivé jeune. À une période où j’avais pas… Enfin, j’ai toujours pas confiance en moi d’ailleurs, hein. Mais c’est une reconnaissance, quoi. Quand on a pas de formation particulière, qu’on s’est un peu formé seul, on se sent toujours tout petit face aux autres céramistes. Et alors ? Quand on est sélectionné pour Saint-Sulpice, c’est vraiment une reconnaissance.

Anne :
Bravo.
J’ai découvert ton travail au Château de Saint Jean le Blanc. J’avais vraiment été émerveillée, et donc je suis très contente d’être là aujourd’hui. Comment tu en es venu à la céramique ?

Grégoire :
C’était un coup de foudre complet. J’étais un enfant très, très solitaire et j’avais absolument besoin de faire quelque chose de mes mains. Toute mon enfance, je l’ai passée à peindre. Et en parallèle de la peinture, je me passionnais pour les pierres, les minéraux. Ça m’émerveille toujours.
Je dessinais des paysages de montagne alors que j’habite à Gien, qui est un paysage tout plat. Mais dans la montagne, il y avait les roches. Donc c’était associer tout ce qui m’émerveillait.

En grandissant, j’ai fait des études générales, faute de moyens, j’ai vite commencé à travailler, mais j’avais quand même dans l’idée de faire quelque chose avec mes mains et, si possible, avec le minéral. Je ne connaissais pas du tout la céramique. J’ai entendu parler de La Borne, qui est un village de potiers pas loin de chez moi. J’y suis allé pour me promener. Je venais tout juste d’avoir ma première voiture, je commençais à être mobile, alors je suis allé à La Borne.


C’était un coup de foudre. Là, j’ai vraiment vu le lien. Pour moi, les poteries, c’est de la pierre. Je retrouve tout ce que j’aime dans la roche, dans le travail des potiers et en même temps, c’est un travail de la main.

Anne :
Oui, La Borne, c’est un village entièrement de potiers, il y a…

Grégoire :
Oui, c’est un village de potiers, spécialement de grès, qui a vraiment la culture du grès cuit au bois. C’est une poterie vraiment très minérale avec des grès, souvent des grès bruts pyrités. Parfois pas nettoyés. On retrouve tous les minéraux du sol dans les pots. Quand on aime cette matière là, c’est merveilleux. Et puis, il y a des immenses céramistes à La Borne. Alors moi, j’y suis allé très naïvement en ne connaissant rien.
J’ai vu, je me souviendrai toujours, les grandes jarres de Georges SYBESMA . Voilà, ça a été vraiment un coup de foudre.

georges sybesma
georges sybesma ceramique

Anne :
Donc, tu fais quand même des grandes pièces, globalement.

Grégoire :
Oui, oui. Je pense que Georges SYBESMA , c’est peut-être la personne qui m’aura le plus influencé. Il y a l’idée de la grande jarre. C’est quelque chose de… c’est une sculpture, c’est un objet extérieur, mais en même temps, c’est totalement une sculpture.

Anne :
Et tu travailles donc le grès aussi.

Grégoire :
Alors je travaille le grès mais très différent du grès de La Borne. Au départ ,simplement par faute de moyens. Quand j’ai commencé, je suis revenu de La Borne, j’ai eu envie de m’y mettre, mais il faut des moyens. Donc, je me suis trouvé un petit tour de potier d’occasion et j’ai acheté une terre qui était la moins chère que je trouvais. C’était une faïence blanche.
J’avais pas de four et tout, donc j’ai juste essayé dans le sous-sol de ma maison de tourner des pots. J’ai passé un an dans le sous-sol de ma maison à juste essayer de savoir tourner un pot, ce qui est déjà pas mal.


As-tu as appris à tourner seul?

Grégoire :
Oui, chez moi, dans mon petit atelier. C’est ça. Pas par choix, un peu par faute de moyens. Et donc là, tu vis de la céramique maintenant.

Anne :
Super.

Grégoire :
Ouais, ouais, c’est tout récent. En fait, j’ai gardé mon boulot salarié très longtemps parce que ça me rassurait. Je suis pas quelqu’un qui a beaucoup confiance en moi. Mais oui, je vis de la céramique maintenant.

Comment tu tournes tes pots en termes de technique, tu les tournes en une fois ou en plusieurs ?

Grégoire LEMAIRE:
Oui, alors souvent en deux parties. Voilà, en deux parties. Ça permet de monter la terre assez haut et après on travaille la forme dans son ensemble.

ceramique gregoire lemaire

Anne :
Ok, donc là une grande pièce comme il y a derrière toi, c’est en deux fois ?

Grégoire :
Ouais, c’est ça. En fait, je vais tourner un grand cylindre, sans fond, avec à peu près un pain de terre complet sur la girelle. On a 12 kilos de terre sur la girelle, je façonne un cylindre relativement imparfait et rapidement. Je le laisse un peu sécher puis je retourne cylindre sur la base. Cette base sert de réserve de terre que je vais pouvoir étirer et remonter ensuite.

Anne :
Et au niveau des décors, tu utilises de l’engobe ou de l’émail ?

engobe email ceramique gregoire lemaire base temperature
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Grégoire :
Alors c’est plutôt une recette d’émail, mais que je sous-cuit volontairement. C’est à la frontière entre l’engobe et l’émail. À 1300°, j’aurais quelque chose de complètement vitrifié. Moi, j’aime l’idée d’arrêter ma cuisson au tout début de la vitrification, pour garder un effet satiné. Et en même temps, cela permet de réduire un peu l’impact de ce qu’on fait, notamment en divisant par deux ma consommation d’énergie à 1100°.

Anne :
Tu as un four électrique ?

Grégoire :
Oui, électrique uniquement. Je pense qu’il y aura d’autres fours dans le futur, mais j’étudie ça. Et le rêve ultime, c’est le four à bois. Je sais que ça va prendre des années, mais j’ai une immense admiration pour les potiers de La Borne qui cuisent au bois. C’est un apprentissage.

four a bois laborne

Anne :
Super. Et au niveau des décors ? J’ai l’impression que c’est une grosse partie de ton travail quand même.

Grégoire :
Il y a plein d’étapes différentes. Je crois que ce que j’aime le plus, c’est le tournage. C’est devenu une quasi-addiction. Le tournage et la gravure, l’étape qui vient juste après. Je commence juste après avoir tourné mon pot, à faire des petites entailles dans la terre avec des couteaux et des petites mirettes bricolées. Ce sont vraiment des étapes que j’adore. La gravure permet de faire une première ébauche du motif, soit je fais juste les limites des zones avec des petits traits très fins, soit pour les pièces avec plus de gravure, je couvre la pièce entièrement avec des lignes à la mirette. Voilà, ce sont des étapes que j’adore.

gravure ceramique gregoire lemaire
gravure ceramique poterie gregoire lemaire

Anne : D’accord, c’est très long et très…

Grégoire : C’est très lent, presque méditatif, mais je pense que ça correspond à un besoin très introverti. Et j’ai besoin de ce moment très long en fait. Moi, j’aime passer beaucoup de temps sur chaque pièce. Je ne suis pas quelqu’un qui travaille vite ; j’aime l’ouvrage, l’artisan qui passe du temps sur son ouvrage.

Où est-ce que tu cherches tes inspirations ?

Grégoire LEMAIRE:

Alors, c’est un cheminement en fait. Il y a des influences, bien sûr, parce qu’il y a plein de potiers que j’admire. Je pense qu’il reste quelque chose de l’influence de Georges SYBESMA , surtout dans l’idée de rythmer une surface avec des stries. Gustavo PEREZ m’a aussi beaucoup influencé par sa manière de travailler les entailles dans la terre.

gustav operez ceramique

Puis, il y a des artistes moins connus, comme Emmanuel PECCATTE, avec qui je me sens très proche dans notre travail, même si nos techniques sont différentes et que je l’ai découvert plus tard.

emmanuel peccatte ceramique

Pour moi, la céramique, c’est nourri par tout ce que l’on voit, tout ce que l’on rencontre. Je ne raisonne pas en termes de démarches ou d’influences. C’est plutôt un cheminement personnel : je fais une pièce qui m’inspire à en faire une autre et à chaque nouvelle pièce il y a des petites choses à explorer, parfois issues d’un accident que l’on veut reproduire. C’est pour ça que parfois je me disperse, mais j’aime bien cette dispersion. En plus, cela permet d’apprendre.

Anne: Tu as pas mal de collections différentes, certaines où tu graves, d’autres avec des formes plus organiques.

different style de gregoire lemaire ceramiste

Grégoire LEMAIRE :

Oui, je m’autorise vraiment à suivre toutes mes envies. C’est un luxe de pouvoir faire ça, et j’aime l’idée que la cohérence de mon travail arrive malgré moi. Je ne me prive pas d’explorer des choses très différentes et je laisse les choses venir naturellement.

 

Anne:

Quelle est la prochaine exposition que tu prépares ?

La prochaine exposition me tient vraiment à cœur. On retourne à La Borne pendant les grands feux.

la borne 2024

C’est la première fois que j’y expose pendant cet événement. J’ai déjà participé à des marchés près de La Borne, mais là, c’est un peu différent. En plus, ce sera une exposition en duo avec une céramiste que j’adore, Myriam Bouchard ( compte instagram https://www.instagram.com/p/C5s-xyLMPNh/?hl=fr&img_index=1.

myriam bouchard ceramiste

Cela va être un moment très important pour moi. C’est aussi un retour aux sources, car c’est à La Borne que j’ai découvert la poterie, il y a 20 ans.

Anne: Pour ceux qui ne connaissent pas, les grands feux de La Borne, c’est exceptionnel. On y voit des cuissons au bois…

la borne les feux

Grégoire: Oui, c’est un événement qui attire de plus en plus de monde. Voir un four à bois en marche, c’est vraiment un spectacle à voir au moins une fois dans sa vie. Pendant les grands feux, on est sûr de voir des fours allumés, des animations et des expositions. C’est un moment d’effervescence vraiment extraordinaire.

Anne: Allez voir Grégoire pendant les grands feux !

Interview de Grégoire LEMAIRE Céramiste;

Pour contacter GREGOIRE LEMAIRE :

Son site web
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gregoire lemaire

Pour retrouver des tutos sur la poterie par ici TUTOS

 

Anne Rouillé

Artisan céramiste passionnée par le travail de l'argile, amoureuse des émaux.

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